Le chemin de lumière
Petit hommage au « découvreur » de ce phénomène remarquable qu'est le chemin de lumière...
Les constructeurs de la basilique de la Madeleine avaient probablement l'intention de créer un signe (symbole) pour rattacher le monde visible (les pierres de l'ouvrage et le monde matériel) au monde invisible (le monde spirituel). De ce point de vue, la basilique est un passage, une porte vers l'au-delà. C'est pourquoi le portail intérieur montre le Christ accueillant ses ouailles.
Le père Hugues Delautre (que j'ai connu lorsque j'étais encore un enfant) en parle ainsi dans le numéro 122 de la revue Zodiaque. Ce qui frappe dans cette église romane c'est sa surprenante luminosité, due aux doubles rangées d'ouvertures, la première éclairant les déambulatoires, de chaque côté de la nef et les autres situés plus haut éclairant directement cette dernière.
L'édifice datant de 1120 à 1150, les intentions des bâtisseurs (il faut se remettre dans l'époque où le religieux domine la vie dans tous ses aspects) étaient sans aucun doute un hommage au divin. À mon sens, il ne faudrait pas voir dans l'édifice un simple « cadran solaire » (il s'agirait d'une vision moderne où le divin et la matière se veulent séparés et pour certains même inconciliables).
Les « flaques » de lumière (taches plus ou moins circulaires) sont autant de stations (au sens chrétien) pour qui veut cheminer vers le chœur lumineux et lointain qui promet la vie éternelle.
La Madeleine n'est pas (contrairement à une opinion répandue) orientée exactement selon l'axe est-ouest mais en dévie de quelques degrés (10° environ).
Sur la vue aérienne Google map on observe bien cette légère (mais forcément significative si on admet une intention des bâtisseurs) déviation et grâce à une photo prise par Charles-Henri Eyraud le 22 mai 2001 au matin montrant le soleil apparaître à travers le vitrail central du chœur, on a pû calculer l'écart de l'alignement de la nef avec l'axe est-ouest (on obtient le résultat de 79°5 comptés à partir du nord).
Au solstice d'été (le 21 juin), le soleil culmine à 23° et ses rayons passent par les ouvertures supérieures (au nombre de neuf) et projettent alors les taches alignées (sauf une légèrement décalée) au centre de la nef. Ce phénomène se produit légèrement avant le midi solaire (au moment où celui-ci se présente perpendiculairement au mur droit de la nef). En fait, cela se produit au cours d'une période d'environ une quinzaine de jours chevauchant la date précitée.
Les taches semblent alignées en une droite parfaite. En réalité, elles s'alignent le long d'un arc hyperbolique qui, dans les faits, s'assimile à une droite rectiligne. Au fil du temps, l'ensemble des taches se rapprochent du chœur, en une invitation à avancer vers ce dernier. L'alignement dure environ une demi-heure (de 11h25 à 12h solaire).
Le père Hugues stipule qu'au Moyen-Age le solstice d'été renvoie à la fête de saint Jean-Baptiste (24 juin) tandis que celui d'hiver renvoie à la naissance du Christ (25 décembre), rappelant ainsi l'origine chrétienne de l'ouvrage (d'où les intentions « cachées »).
Il rappelle également que, s'il est légitime d'étudier le phénomène de manière objective (utilisant son seul intellect, donc), on peut également le considérer comme une « œuvre d'art » et l'observer avec les yeux du cœur (selon une formule consacrée) pour l'admirer comme tel. Les pèlerins ne s'y trompent pas qui se nourrissent de l'énergie spirituelle donnée par les flaques de lumières du chemin menant vers le chœur.